La biomasse
La biomasse est le terme générique de toute matière organique pouvant faire l’objet d’une valorisation, quelle que soit sa nature et son origine (déchets, cultures) De multiples filières de valorisation de la biomasse connaissent une évolution croissante. La biomasse est une énergie renouvelable qui a de l’avenir
La biomasse pour fournir de la bioénergie, des biogaz et des biocarburants
Si l’application la plus généralement répandue à travers le monde est la combustion directe de la biomasse pour la cuisson et le chauffage, la fermentation biologique avec production de biogaz est aussi bien représentée. Par contre, sa combustion avec production de vapeur et génération d’électricité est encore marginale.
Les technologies disponibles pour produire de l’énergie à partir de la biomasse sont multiples. Schématiquement, elles peuvent être subdivisées comme suit :
les techniques de production agricole à proprement parler;
- les techniques de préparation ou conditionnement de la biomasse;
- les techniques de conversion primaire comprenant toutes les opérations transformant la biomasse en gaz, en liquide ou en vapeur;
- les techniques de conversion secondaire transformant les combustibles obtenus en énergie électrique ou en chaleur.
Le nombre de combinaison, des différentes techniques de production, récoltes/ramassages, trans formations et conversions est très vaste et ne fait pas l’objet de cette étude.
La figure ci-contre présente, les filières classiques de valorisation énergétique de la biomasse.
Les intrants : cultures énergétiques et déchets
Le principal avantage de la biomasse par rapport aux autres formes d’énergies renouvelables réside dans son stockage aisé. Son désavantage majeur concerne le développement de cultures intensives et à grande échelle destinées à des fins énergétiques: elles peuvent entraîner des dégradations importantes de la qualité des sols et des contaminations des nappes souterraines suite aux épandages d’engrais et de pesticides.
Elles constituent en outre une atteinte aux paysages et risquent d’entraîner une perte de biodiversité.
Les plantes énergétiques
Les plantes énergétiques peuvent être cultivées dans différents buts: soit elles sont destinées à un usage uniquement énergétique, soit dans un but combiné: alimentaire, pharmaceutique ou chimique/énergétique. Ainsi, la production de blé à des fins alimentaires peut très bien être couplée à la production de chaleur par la combustion du surplus de paille (Angleterre et Danemark). De même, l’exploitation en cascade du bois, de la pâte à papier à sa réutilisation, son recyclage puis sa combustion est tout à fait réalisable (U.S.A., Canada et Suède).
Les développements technologiques en matière de production agricole ont abouti à un accroissement de productivité de + 2% par an durant ces 10 dernières années et tout porte à croire que cette tendance va se prolonger grâce aux progrès en biotechnologie. Il faut toutefois remarquer que si les cultures classiques telles que la betterave sucrière ou le blé sont bien maîtrisées dans nos pays, il n’en va pas de même pour les plantes intéressantes en terme énergétique telles que le sorgho sucrier (encore au stade de la recherche) ou le miscanthus (qui nécessite de nouveaux systèmes de production et de récolte – tests en cours en Allemagne, au Danemark et en Wallonie).
De gros efforts doivent encore être réalisés pour limiter l’usage de pesticides et d’engrais sur les cultures.
Les cultures énergétiques comprennent :
- le bois : taillis à courte rotation (récolte tous les 3 à 5 ans – saule et peuplier) ou croissance rapide (cycle de 6 à 15 ans- peuplier);
- les plantes sucrières ou riches en amidon pour la production de bioéthanol (canne à sucre, maïs, sorgho, betterave sucrière, blé,…)
- les oléagineux pour la production de biodiesel (colza, …)
- les plantes pérennes (miscanthus)
Les déchets
Les déchets d’origine biologique et leur contenu énergétique sont extrêmement variés. La politique de recyclage à venir ne sera pas sans influence sur tes volumes et les caractéristiques de ces déchets. Ils comprennent:
- Les déchets de bois:
Les déchets de la filière bois constituent une ressource encore trop souvent négligée qui peut être utilisée efficacement dans des petites centrales électriques (cfr. expériences scandinaves). - Les déchets solides agricoles:
Dans nos pays, il s’agit essentiellement de la paille en surplus qui constitue un bon combustible (cfr. expériences anglaise et danoise).
- Les déchets organiques humides:
Il s’agit principalement des déjections animales, déchets et effluents alimentaires industriels, boues uses… La digestion anaérobie de ces déchets produit du biogaz, composé principalement de méthane et CO2., Il peut servir comme source de chaleur et/ou d’électricité (développé plus loin). - Les déchets ménagers solides:
La fraction organique des ordures ménagères pourrait subir une digestion anaérobie . Or, les ordures brutes sont actuellement bien incinérées (U.S.A., Allemagne, France, Danemark et Suède) avec éventuellement récupération de chaleur et parfois production d’un surplus électricité. En augmentant la proportion du recyclage et en éliminant la proportion des déchets impropres à la combustion, le combustible obtenu peut être de bonne qualité: les émissions polluantes des incinérateurs et les opératoires sont alors diminués. Le gaz de décharge, produit et récupéré sur site, souvent très compétitif, est utilisé pour la production de chaleur ou d’électricité principalement en Allemagne et en Angleterre. - Les déchets industriels:
Ce type de déchet est encore trop peu exploité. On peut citer à titre d’exemple, les palettes en bois, dont des centaines de milliers de tonnes sont encore mises en décharge en Wallonie, alors que des projets de valorisation existent dans d’autres pays.-
Les techniques de conditionnement de la biomasse
Compactage et séchage de la matière
Généralement, la matière première cultivée ou issue de résidus présente un taux d’humidité très élevé et un volume important. Ces caractéristiques rendent difficile et coûteux son transport, son stockage et son traitement, en particulier pour les transformations thermochimiques.
Des opérations de compactage et de séchage sont donc nécessaires. Bien que maîtrisées, ces techniques nécessitent des adaptations particulières chaque source d’énergie.
La réduction de cette biomasse en fins copeaux ou en poudre, utile pour les procédés biochimiques de conversion des matières lignocellulosiques, rend, par contre, leurs transformations thermochimiques fort difficiles à contrôler.
L’une des approches les plus attrayantes consiste à densifier les matières finement divisées, pour. les transformer en produits compacts, d’usage polyvalent. La densification peut s’effectuer, soit à l’aide de liants, soit sans , cette dernière voie étant généralement préférée, car elle est d’un moindre coût et évite la dépendance par rapport au liant.
On a alors recours à des presses de différents types, annuaires, à piston, à vis conique ou à vis et à manteau chauffant.
Conversion primaire de la biomasse
Le domaine des techniques de conversion de la biomasse est très vaste: il comprend toutes les opérations transformant la biomasse en fuels liquides, gazeux ou solides, en vapeur ou en gaz de combustion chaud.
- Schématiquement, elles sont présentées comme suit:
la digestion anaérobie ou biométhanisation ; - la production d’éthanol (bioéthanol) par fermentation de plantes riches en sucre/amidon;
l’extraction d’huiles végétales de plantes oléagineuses; - la production de fuels liquides, solides ou gazeux parallèlement à celle de diverses molécules intéressantes pour l’industrie alimentaire ou d’autres par la conversion biochimique de plantes lignocellulosiques;
- la production de fuels liquides, solides ou gazeux par des méthodes thermochimiques.
La biométhanisation
En absence d’aire (anaérobiose), les matières organiques se décomposent sous l’action combinée de différents micro-organismes. La dégradation s’opère en une suite d’étapes et aboutit à la formation d’un mélange gazeux combustible appelé biogaz.
La conversion thermochimique
Quatre méthodes de conversion thermochimique de la biomasse existent: la combustion, la gazéification, la pyrolyse et la liquéfaction.
Le bioéthanol
L’éthanol obtenu par fermentation de sucres, provenant de plantes sucrières (betteraves,…) ou de céréales (blé, mais,…), est appelé bioéthanol. Il peut être utilisé comme carburant pur dans des moteurs adaptés.
Il peut aussi être employé en mélange avec les essences, en remplacement du plomb, tel quel ou sous forme d’ETBE (éthyl-tertio-butyl-éther).
La production d’éthanol, schématisée à la figure ci-contre, nécessite différentes étapes: obtention d’un jus composé de sucres fermentescibles: ceux-ci sont obtenus par simple extraction pour les plantes sucrières et par hydrolyse enzymatique ou acide de l’amidon pour les céréales. Les sucres sont ensuite soumis à l’action de levures qui les transforment en éthanol; ce dernier est enfin extrait par distillation. L’ETBE est formé par réaction de l’éthanol anhydre sur l’isobutène.
Les États-Unis tirent leur éthanol du maïs et les français de la betterave principalement. La fermentation éthanolique des plantes en C 4, principalement la canne à sucre, est réalisée dans de nombreux pays (Brésil,…) même si la technique peut encore être améliorée (hydrolyse enzymatique).
Contrairement aux carburants d’origine fossile, la filière des biocarburants est caractérisée par un bilan global en C02 équilibré. Les rejets en monoxyde de carbone, CO, en dioxyde de soufre, SO2, et en hydrocarbures sont moindres, mais les émissions de composés organiques volatils sont plus importantes.
Huiles et esters d’huiles
Des huiles végétales ou des esters d’huile végétale sont produites à partir de plantes oléagineuses (colza, soja, arachide, tournesol). Ces produits peuvent se substituer partiellement au diesel, voire totalement, sans modification du moteur pour les esters.
Cette production, schématisée à la figure ci-joint., est techniquement au point. Elle nécessite une extraction d’huile, réalisée par pressage mécanique puis par solvant dans les industries alimentaires à partir de plantes oléagineuses. Après raffinage, on fait réagir cette huile (principalement le triglycéride) avec un alcool simple (méthanol) par un processus chimique dit de transestérification.
On obtient ainsi des esters d’huiles végétales, esters méthyliques ou MEC, et de la glycérine. Cette dernière est un coproduit, ne représentant que +/- 10% de la production, mais de valeur marchande élevée, ce qui permet de rentabiliser le processus.
De nombreux pays expérimentent ce carburant : en Italie, en France, en Belgique ou en Allemagne des essais ont été réalisés avec de l’ester de colza.
En général, les tests réalisés ont montré que les biocarburants rejettent moins de polluants dans l’atmosphère que les carburants fossiles, sauf les oxydes d’azote.
La conversion biochimique
En travaillant à température ambiante, ces procédés permettent de rompre avec précision certains liens spécifiques qui existent entre les différentes molécules constituant les matières lignocellulosiques et génèrent ainsi une grande variété de nouveaux produits. Ceux-ci peuvent être exploités comme fertilisants, aliments ou ingrédients alimentaires; ils peuvent également être convertis en fuels solides, liquides ou gazeux.
L’avantage de ce type de procédé par rapport aux procédés de conversion thermochimique, pourtant plus faciles et plus rapides à réaliser (voir plus bas), est de ne pas détruire la richesse que représente la diversité chimique de la matière première et de limiter les émissions de gaz à effet de serre. Ces technologies ne sont pas encore au point; leur grand potentiel d’application dans le domaine non énergétique explique les nombreux efforts consentis dans cette voie.
La conversion biochimique des plantes lignocellulosiques suppose différentes étapes: prétraitement de la matière première :
Le pré-traitement
La matière première solide, réduite en une fine poudre, est tout d’abord traitée de manière à garantir l’attaque sélective en ces 3 constituants polymériques (cellulose, hémicellulose et lignine) ultérieurement: il est réalisé à la vapeur ou à l’acide dilué (hydrolyse acide).
L’hydrolyse hémicellulosique
Une large batterie d’enzymes est nécessaire pour dégrader l’hémicellulose complètement. Cette technique, pas encore au point, est délicate de par la grande variété des structures hémicellulosiques et de propriétés enzymatiques.
L’hydrolyse cellulosique
La complexité de cette réaction est fonction de la structure du matériau.Les recherches dans le domaine de la biologie moléculaire permettent de comprendre comment enzymes et micro-organismes dégradent la cellulose.
La lignine
La lignine est la plus difficile à décomposer; une voie d’avenir semble être l’attaque par les enzymes lignolytiques produits par certains champignons.
La conversion secondaire de la biomasse
Les combustibles obtenus par les divers procédés décrits ci-dessus sont ensuite convertis en énergie électrique ou en chaleur par l’intermédiaire de chaudières, moteurs ou turbines.
L’adaptation des chaudières classiques à un combustible non fossile ne nécessite que des petites modifications. Les technologies conventionnelles de moteurs à vapeur sont bien maîtrisées. La mise au point de turbine à vapeur adaptées à ce processus est en passe d’aboutir. Les moteurs à combustion interne fonctionnant au gaz de décharge sont opérationnels mais leur possibilité d’utilisation à partir de gaz de gazéification ou de pyrolyse n’est pas encore démontrée. Les turbines à gaz et à cycle à gaz combiné sont opérationnelles à partir de gaz de décharge mais elles doivent encore être améliorées pour l’utilisation de fuels provenant de la biomasse gazéifiée. Les turbines à gaz en céramique et les moteurs Stirling (moteurs à combustion externe), efficaces pour la conversion de la biomasse à petite échelle, sont appelés à être développés dans les prochaines années.
PERSPECTIVES ET DÉVELOPPEMENT
La biométhanisation a connu des revers divers ces dernières années. Si on analyse les causes de ces déboires passés, il apparaît clairement que la biométhanisation a encore de multiples perspectives d’avenir. Les projets de démonstration relatifs aux installations collectives de biométhanisation d’effluents d’élevage, conjointement à d’autres effluents ou déchets, ont des résultats assez prometteurs. Les problèmes croissants liés à l’accumulation des ordures ménagères rendent indispensables la sélectivité de la collecte et la valorisation optimale des différentes fractions.
Dans ce contexte, la biométhanisation des déchets verts et organiques est une filière de choix, car elle permet à la fois de récupérer de l’énergie et de produire un compost qui peut être utilisé comme amendement organique du sol. C’est pourquoi, de nombreux laboratoires à travers le monde poursuivent leur travaux afin d’améliorer les performances et la fiabilité des procédés de digestion anaérobie des déchets et d’en réduire le coût. Les procédés de méthanisation des effluents industriels font aussi l’objet de recherches. Parmi celles-ci, les efforts poursuivis afin de pallier les problèmes de stabilité du procédé le plus répandu, c’est à dire I’UASB (lit de boue), ont débouché sur une solution hybride; le lit de boue est surmonté d’un filtre à flux ascendant qui permet à la fois d’assurer la décantation des bactéries entrainées par l’effluent et parfaire la digestion des matières organiques. Par ailleurs, les procédés en lits fluidisés et expansés semblent atteindre leur maturité.
Un autre créneau potentiel de développement de la biométhanisation provient de l’intérêt grandissant pour la valorisation énergétique de la biomasse. En effet, dans toutes les filières envisagées, la biométhanisation constitue en chaînon indispensable tant pour la valorisation énergétique des fractions résiduelles que par la restitution aux sols de nutriments et d’éléments structurant indispensables.
Des recherches sont également menées pour dégrader des composés toxiques, tels que les organochlorés, par l’action de communautés microbiennes anaérobies, mais cette application ne répond plus à la finalité énergétique qui nous occupe ici.
Les autres énergies renouvelables
L’énergie solaire – L’énergie hydroélectrique – L’énergie éolienne – Les pompes à chaleur– La géothermie